Les passerelles du canal Saint-Martin prennent les noms de grandes comédiennes
Actualité
Mise à jour le 02/12/2025
Pour célébrer le bicentenaire du canal Saint-Martin, les ponts et passerelles du 10e ont pris les noms de grandes comédiennes ayant marqué à jamais l'histoire du théâtre et du cinéma français.
Mirabeau, Simone de Beauvoir, Charles de Gaulle, Léopold Sédar-Senghor, mais aussi les batailles d'Austerlitz ou de Bir-Hakeim… les ponts de la Seine portent depuis longtemps des noms, qui font écho à l'histoire de notre pays. Désormais les passerelles du canal Saint-Martin les rejoignent.
Alors que la première pierre en a été posée il y a 200 ans, les élus du 10e et ceux du Conseil de Paris ont adopté un vœu pour baptiser ces passerelles si emblématiques de notre arrondissement.
Dans ce quartier des théâtres, et sur ce site régulièrement choisi comme décor pour le grand écran, l'équipe municipale a décidé de leur donner les noms de comédiennes et d'actrices iconiques afin d'honorer leur mémoire tout en faisant progresser la place des femmes dans l'espace public : aujourd'hui, grâce à l’engagement de la Ville de Paris, 15 % des rues de Paris portent ainsi le nom d'une femme (contre 6 % en 2001).
Dans cet arrondissement des théâtres, dans ce décor si souvent immortalisé au cinéma, il nous a paru, aux élu-e-s du 10e et à moi-même, logique et juste de rendre hommage aux grandes comédiennes de notre panthéon.
Maire du 10E
Arletty : l'atmosphère du 10e
La première comédienne à donner son nom ? Arletty bien sûr ! Trente ans après sa disparition, la célèbre gouailleuse parisienne, immortalisée par Marcel Carné dans "Hôtel du Nord" en 1938, avec sa fameuse "gueule d'atmosphère" continue de marquer l'histoire du canal Saint-Martin. Même si le film avait été tourné en studios, c'est bien sur l'écluse des Récollets qui reste associée à cette actrice majeure du cinéma des années d'avant-guerre : et ainsi, c'est tout naturellement l'ancienne passerelle de la rue de la Grange-aux-Belles qui a pris son nom.
Maria Casarès : tout près d'Albert Camus
Une deuxième passerelle prend à l'automne 2022 le nom de la tragédienne Maria Casarès. Née en Espagne, cette française d'adoption qui aurait eu 100 ans en cette année, fut une grande figure du théâtre des années 1940, 1950 et 1960. Elle a notamment participé aux premières éditions du festival d'Avignon, au sein de la troupe du Théâtre National Populaire de Jean Vilar. En voyant son nom s'inscrire dans le 10e (l'ancien pont de la rue Eugène Varlin) elle rejoindra ainsi celui qui fut son grand amour, Albert Camus, dont une rue porte le nom dans le quartier voisin de la Grange-aux-Belles.
Maria Casarès (1922-1996)
Crédit photo :
Studio Harcourt / Ministère de la Culture / RMN-Grand Palais - AFP
Emmanuelle Riva, entre théâtre et cinéma
Enfin, troisième époque avec Emmanuelle Riva. Révélée en 1959 par "Hiroshima mon amour" d'Alain Resnais, sa longue carrière l'a longtemps conduite vers les planches tandis qu'elle se faisait plus discrète sur le grand écran. En 2012, au cours d'une de ses dernières apparitions cinématographiques, dans "Amour" de Michael Haneke, elle reçoit finalement le César de la meilleure actrice. C'est la passerelle de l'avenue Richerand qui portera sa mémoire.
Michèle Morgan : les beaux yeux du canal
En février 2025, Michèle Morgan a donné son nom à une quatrième passerelle ! De son vrai nom Simone Roussel, la comédienne adopte le pseudonyme de Michèle Morgan, inspiré par la banque américaine éponyme et par amour pour un camarade qui lui confie « rêver d’une Michèle dans [sa] vie ». Au fil de sa carrière, riche de plus de 70 films, elle joue notamment dans Quai des brumes où Jean Gabin lui adresse la célèbre réplique : « T'as d'beaux yeux, tu sais. » Elle est récompensée par le Grand Prix d’interprétation féminine au premier festival de Cannes de 1946, puis par un César d’honneur en 1992 et un Lion d’or d’honneur en 1996. C'est la passerelle à la hauteur de la rue Bichat qui perpétuera sa mémoire.
Bernadette Lafont, libre et militante
À l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, le 8 mars 2025, Bernadette Lafont s'est inscrite entre les rives du canal. Comptant parmi les des figures de proue d’un cinéma en pleine mutation, l'artiste refusait les étiquettes, brouillait les frontières entre la comédie et le drame, entre l’intime et le politique. Fervente militante pour le droit à l'avortement, elle a signé en 1971 le Manifeste des 343, revendiquant haut et fort le droit des femmes à disposer de leur corps. En 2003, elle a été couronnée d'un César d'honneur pour l'ensemble de sa carrière.
Bernadette Lafont (1938-2013)
Crédit photo :
Bernadette Lafont dans le film "Les Godelureaux" de Claude Chabrol (1961)
Maria Pacôme
Née en juillet 1923 à Paris (14e), cette comédienne formée au cours Florent, connue à la fois pour ses rôles au théâtre et au cinéma, devient au fil de sa carrière, des années 1950 à 2000, une figure emblématique du théâtre de boulevard, où elle excelle notamment dans les rôles de bourgeoise exubérante. En 1993, le film La Crise de Coline Serreau lui vaut une nomination au César de la meilleure actrice dans un second rôle. Elle repose au cimetière du Père-Lachaise (20e). Le « pont Maria Pacôme » part de la rue Louis Blanc.
Jane Birkin
C'est l'ancienne passerelle des Douanes, reliant les deux quais au niveau de la rue Léon Jouhaux, qui prend le nom de la plus française des artistes britanniques. Après des débuts au cinéma en Angleterre dans le film Blow-up d'Antonioni, elle rejoint la France en 1968 et rencontre, sur le tournage du film Slogan, Serge Gainsbourg, dont elle deviendra la muse.
Son premier disque à ses côtés, Je t'aime… moi non plus, est un succès international. Et les albums s'enchaineront pendant quarante ans, couronnés de deux Victoires de la musique ! Elle poursuit en parallèle sa carrière d'actrice et se tourne même vers la réalisation. Elle décède le 16 juillet 2023 à 76 ans. Elle est inhumée au cimetière du Montparnasse.
Hélène Duc
Hélène Duc est connue pour sa carrière au cinéma et à la télévision - la série Les Rois maudits, Les Grandes Manœuvres de René Clair (1955), Le Déjeuner sur l’herbe de Jean Renoir (1959), La Femme en bleu de Michel Deville (1972), ou encore Tanguy d’Étienne Chatiliez (2001) -, mais ce sont ses actions dans la résistance qui lui vaudront, en 2011, la Légion d'Honneur et le titre de Juste parmi les nations. Durant les années de guerre, elle organisa avec sa mère un réseau d’accueil de familles juives en Dordogne, puis continua cette action en 1943 depuis Paris, prenant en charge la jeune Juliette Greco dont la mère et la sœur avaient été déportées.
Maria Schneider
L’actrice française Maria Schneider sur le tournage de Dernier Tango à Paris, réalisé par l’Italien Bernardo Bertolucci, le 2 février 1972
Crédit photo :
Getty Images
Dans le film qui l'a rendu célèbre, Le Dernier Tango à Paris, le personnage de Tom demande en mariage Jeanne (Maria Schneider) sur le canal Saint-Martin… Mais si l'ouvrage, auparavant connu sous le nom de passerelle Alibert, a pris son nom, c'est aussi pour sa longue carrière dans le cinéma français - Madly de Roger Kahane (1970), Profession : reporter d'Antonioni (1975), La Dérobade de Daniel Duval (1980) - et pour ses combats visant à dénoncer la violence et les abus systémiques de l'industrie du cinéma.
