Une petite histoire des hôpitaux du 10e

Le saviez-vous ?

Mise à jour le 15/10/2020

Alors que la deuxième vague de l'épidémie de Covid-19 conduit à l'instauration d'un couvre-feu à Paris, en Île-de-France et dans huit métropoles du pays, et que nos soignants continuent de se mobiliser pour sauver des vies, petit détour par les hôpitaux du 10e, dont vous ne connaissez peut-être pas tous les secrets !

Aux origines de la vocation hospitalière du 10e

L'histoire du 10e arrondissement, c'est d'abord celle d'un territoire "hors les murs". Comme tous les faubourgs du Paris médiéval, c'est donc un secteur où l'on installe tout ce qui doit être isolé du cœur battant de la ville : les monastères, les cimetières, les lieux d'exécution comme le gibet de Montfaucon, ou encore les institutions médicales. On éloigne d'autant plus ces dernières qu'à l'époque, on ne sait pas soigner les maladies, et qu'elles sont vite très contagieuses. C'est par exemple le cas de la lèpre.
Ainsi, dès le début du XIIe siècle, une léproserie s'installe sur la route conduisant à Saint-Denis. À ses coté s’étendaient de vastes champs et une ferme permettant de subvenir aux besoins des malades. Cette institution s'agrandira progressivement, jusqu’à devenir le plus étendu des enclos de Paris : le clos Saint-Lazare (c'est-à-dire l'actuel quartier du square Alban Satragne).

Lutter contre les épidémies (déjà…)

Les siècles passent, Paris grandit, et même si la vie s'installe peu à peu dans ce bout de campagne, au début du XVIIe siècle, ce qui deviendra le 10e est encore à l'extérieur des remparts. La vocation hospitalière du territoire ne disparaît donc pas.
Entre 1605 et 1606 sévissent des épidémies de peste. Cette situation conduit Henri IV, en 1607, à créer l'hôpital Saint-Louis (qui porte le nom de son ancêtre, mort précisément de la peste en 1270). Ce lieu, réalisé par l’architecte Claude Vellefaux (à qui rend hommage l'avenue du même nom), est achevé en 1612.
Initialement, l’établissement ne fonctionne que pendant les périodes d’épidémies. Mais l'incendie de l'Hôtel-Dieu, en 1773, conduit à l’ouverture permanente de l'hôpital Saint-Louis. C'est seulement en 1801 que cette maison de santé deviendra un établissement à part entière.

Vers l'hôpital moderne

Encore quelques centaines d'années plus tard, et Napoléon III décide de moderniser sa capitale, avec l'aide du préfet Haussmann. Dans ce siècle qui prône les valeurs hygiénistes, il est décidé de désengorger les vieux hospices parisiens, et de créer des hôpitaux modernes. C'est la raison de la création des hôpitaux Lariboisière (1854) et Fernand Widal (1858).
Lariboisière répond aux exigences des autorités médicales et de l'Académie des Sciences de l'époque : circulation et renouvellement de l'air, séparation en plusieurs pavillons, grand jardin… Le conseil des hospices parisiens voulait en faire "un monument de charité, où la philanthropie, où la science et l'art soit développés avec tous les progrès du temps".

Et aujourd'hui ?

Aujourd'hui, l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) est le premier employeur en Île-de-France : 39 hôpitaux, plus de 210 métiers exercés, près de 100 000 professionnels au services des patients. Dans le détail, on recense notamment 3 680 internes et 13 220 médecins, 57 595 personnels paramédicaux et socio-éducatifs et 16 411 personnels administratifs, techniques et ouvriers. Autant de gens que l'on peut remercier pour leur dévouement face à l'épidémie.
Dans le 10e, la modernisation des services hospitaliers se poursuit, notamment avec le projet de "Nouveau Lariboisière", qui verra le jour dans les prochaines années.

Un musée très (trop ?) réaliste

Le Musée des Moulages est unique au monde. Niché au cœur de l'hôpital Saint-Louis, c'est le seul musée dédié à une spécialité médicale, avec une collection de cires en aussi grand nombre.
Verrues, pustules, urticaires, mycoses, eczémas… 4800 pièces sont à découvrir dans ce lieu aussi impressionnant qu'effrayant. Ici, tout est très réaliste. La visite de ce qui peut ressembler pour certains à un musée des horreurs est d'ailleurs interdite aux moins de 12 ans.

Une petite sœur de la place des Vosges

Du côté de l''hôpital Saint-Louis toujours, vous avez peut-être déjà remarqué que les bâtiments d'origine ont comme un air de famille avec… la place des Vosges.
Et pour cause. Si c'est bien Claude Vellefaux qui dirige le chantier, c'est l'architecte Claude Chastillon (à qui l'on doit la place des Vosges, construite à partir de 1605), qui a conçu l’organisation du projet de l’hôpital, les plans et les élévations.
Ce qu'on appelle le "carré historique" est donc une petite place des Vosges : une cour carrée de 120 mètres de côté, entourée, comme un cloître, de bâtiments aux façades de briques et de pierres.

Une philanthrope qui a laissé son nom

Avant la construction de l'actuel hôpital Lariboisière, les précédents bâtiments qui occupaient le terrain ont porté différents noms. En 1839, c'est l'hôpital du Nord, en 1841 il est renommé hôpital Louis-Philippe, à la suite de la révolution de 1848 on le rebaptise hôpital de la République, et c'est seulement lors de l'inauguration du nouvel édifice, en 1854, qu'il prend son nom actuel.
Ce nom est celui d’Élisa de Lariboisière (1794-1851) qui, atteinte d'une maladie incurable, avait souhaité léguer son immense fortune (environ 8 millions de francs) à la Ville de Paris, pour que celle-ci fonde un hôpital. Il existe d'ailleurs un beau monument élevé à sa mémoire, dans la chapelle de l'hôpital.
Le saviez-vous ?
"Passer sur le billard", c'est une expression à prendre au sens propre ! Du moins à l'origine.

Au XIXe siècle, la bourgeoisie ne se rendait pas l'hôpital pour se faire opérer, qui était réservé aux plus démunis. On préférait de loin accueillir son chirurgien chez soi. Seulement, pour opérer un patient, un chirurgien a besoin d'un large plan dur. Et dans les grands appartements, c'était donc le billard qui servait de table d'opération… D'où l'expression qui est restée !